Annihilation de Alex Garland. Un cas d’école de SF bateau comme on en fait trop.
Pourquoi les bons films de SF sont si rares ? Ce ne sont pourtant pas les bonnes idées qui manquent. Et bien sûrement parce qu’une bonne idée ne fait pas forcément un bon film. Annihilation en est la démonstration parfaite.
Le film démarre un postulat de départ assez intéressant quoique quelque peu déjà vu : une zone bouclée par le gouvernement américain est sujet à un phénomène étrange et se propage dangereusement. À l’intérieur de la zone, la nature est modifiée en profondeur sans aucune raison scientifique. Cette manifestation probablement extraterrestre est un mystère.
Jusque-là le film donne envie de cliquer (distribution Netflix oblige). Mais au bout de quelques minutes seulement, le film dévoile déjà un grand problème : un jeu d’acteurs consternant, entre une Natalie Portman jouant son propre rôle, un Oscar Isaac éteint et une Jennifer Jason Leigh ailleurs.
Néanmoins, la suite n’est pas plus plaisante. Le film accumule les faux raccords, plans médiocres et incohérences, qui nous sortent vite de l’intrigue du film. Entre le laboratoire scientifique peu crédible et des personnages stéréotypés au possible, les erreurs s’enchaînent. L’esthétique globale durant les trente premières minutes du film est insipide, voire désagréable. Ce n’est qu’une fois nos protagonistes à l’intérieur de la zone que les couleurs sont plus harmonieuses et éclatantes même si l’ensemble manque un peu de réalisme : on navigue dans un monde féérique peut-être trop superficiel.
On se demande alors si on n’arrêterait pas le visionnage ici. On continue néanmoins à regarder par curiosité en espérant tomber sur une fin honorable tout en se lamentant sur les faiblesses récurrentes qui en deviennent presque pathétiques. Mais rien n’y fait, jusqu’au bout le film ne sera pas surprenant. La fin est connue d’avance.
Le film est donc globalement décevant, se contentant souvent de recycler des clichés déjà vus sans vraiment chercher sa propre identité, malgré des choix visuels parfois extravagants. De plus, certaines idées sont originales mais toujours mal exploitées. Par exemple, le film aurait pu mieux utiliser les moments de found footage avec le personnage d’Oscar Isaac ou les découvertes scientifiques réalisées par le personnage de Natalie Portman ; et surtout réussir les scènes d’actions avec les monstres !
Mais, le problème majeur du film, c’est qu’on n’y croit pas un seul instant. Les erreurs sont trop fréquentes pour maintenir le spectateur en haleine, les personnages ne sont pas attachants et l’enjeu s’envole très vite. Aussi, le choix de faire un film plutôt contemplatif avec des scènes d’action se révèle assez inefficace. Il aurait peut-être été plus judicieux de jouer sur le mystère autour de la zone et de l’angoisse des personnages.
Finalement, le film est long, lent et souvent ennuyeux. L’ensemble est creux, les scènes d’action sont navrantes et on ne ressent jamais aucune peur ou empathie envers les personnages. L’intrigue perd trop vite de son intérêt. La fin est convenue.
Ainsi, le film se classe parmi ces films de SF-moyen/décevant qui attirent par un postulat de départ assez intéressant et un casting superstar mais qui se révèlent être des nanars à gros budget (Passengers en tête ou Oblivion dans une moindre mesure). On est loin d’un Denis Villeneuve par exemple. En effet, le film souffre nécessairement de la comparaison avec Premier contact, dont l’intrigue peut paraitre semblable sur certains points : un évènement super-naturel arrivant soudainement dans notre monde actuel. Mais là où Denis Villeneuve déroule une histoire toute en maitrise, utilisant le conflit entre une approche scientifique ou militaire et conservant le mystère tout le long du film, Annihilation empile les clichés et perd trop vite de son intérêt. Mais surtout, la force de Premier Contact, c’est qu’on y croit ! C’est un film qui a compris bien plus de choses. Il arrive à conserver la crédibilité de l’enjeu, notamment par une réalisation toujours réaliste, alors qu’Annihilation tombe trop facilement dans des travers scénaristiques qui en font une œuvre peu réaliste, peut-être aussi par le choix de couleurs vives, au-delà mêmes des nombreux faux-pas qui parsèment l’œuvre. Comparé à Premier contact, le film ne fait clairement pas le poids.
Pourtant, le réalisateur Alex Garland avait démontré un certain talent pour la science-fiction en réalisant Ex Machina notamment (déjà avec Oscar Isaac). Sans être exempt de tout défaut, le film abordait remarquablement bien le thème de l’intelligence artificielle couplé à un thriller psychologique en huis clos.
N’hésitez cependant pas à regarder Annihilation pour vous faire votre propre avis et je vous recommande vivement Premier Contact et Ex Machina.
Vive le cinéma !
Gaétan Chenus