Pour ce nouvel article sur les acteurs ou actrices qui ont bouleversé les codes, Isabelle Huppert en est le maître ou plutôt la maîtresse. Elle a bouleversé les codes d’un jeu de rôle trop las pour être là, elle joue non pas pour devenir quelqu’un mais pour en savoir plus sur elle-même.

On dit souvent d’elle que son jeu est distant, dérangeant voire même inconfortable au regard. Et ma réponse est qu’il l’est.

J’ai réellement découvert Isabelle Huppert dans le film d’Haneke La Pianiste où elle interprète une professeure de piano qui tombe amoureuse et de passion pour un jeune élève, lui révélant par la suite ses insoupçonnables et indiscrètes tendances sadomasochistes. Le film est une symbiose de pourquoi Isabelle Huppert est à ce point merveilleuse : elle définit un jeu comme imprégné de sa propre réalité. Elle ne devient pas pianiste, elle l’est déjà. On notera la scène de fin mythique où elle se poignarde face à ce désir impossible d’assouvir son exception sexuelle : Haneke dessine ici l’un des plus beaux plans dans l’histoire du cinéma.

Huppert a l’habitude de jouer avec les plus grands. Muse de Chabrol, Haneke ou encore Jacquot, elle fait aussi confiance en des réalisateurs moins connus comme avec le film L’Avenir de Mia Hanson-Løve en 2016. C’est en fait le témoignage d’une actrice hors-norme qui sait jouer avec tout le monde et avec, selon moi, une facilité déconcertante.

On lui reproche souvent de jouer avec une certaine distance et froideur qui mettent mal à l’aise le public habitué aux jeux, peut-être, trop codifiés. Mais à qui sait bien observer, sa froideur est son talent.

Actrice admirée car admirable, Isabelle Huppert nous enchantera, je l’espère pour toujours, par ses silences bruyants, par son corps frêle mais fort et par son jeu au combien au-delà des codes.

 

Article écrit par Eros Mennetrier.

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