Tarantino, réalisateur post moderne, s’interroge sur le genre humain et plus
particulièrement sur la limite du genre. En gros, qu’est-ce qui fait qu’une femme est une
femme ?

Simone de Beauvoir disait : « on ne nait pas femme, on le devient ». Ainsi, la
femme n’est pas déterminée biologiquement : la naissance, c’est de l’ordre de la nature,
c’est innée. On devient donc femme dans la société. Il s’agit là d’un acquis culturel. Dès
lors, une femme est une femme parce qu’elle correspond à des codes qui ne sont pas
naturels mais culturellement déterminés. Le genre est donc une construction, une
performance sociale inculquée, intégrée puis exécutée naturellement. Pourtant, il suffit
juste de s’en affranchir : cette construction peut se déconstruire et doit surtout se vivre
comme un choix volontaire.

Objets de désir tantôt fragiles, tantôt hystériques, les femmes ont un rôle très
ambigu et controversé chez Tarantino.

Prenons Reservoir Dogs, l’image des femmes y est totalement expulsée. La seule
référence féminine, c’est durant le rendez-vous au diner où la conversation se tisse
autour de la véritable signification de Like a Virgin de Madonna. D’ailleurs, plus tard, la
chanteuse dira à Tarantino : « It’s about love, not dicks ». Les personnages féminins de
Pulp Fiction, quant à eux, se limitent à des « femmes de ».

Si Lee, Abernathy, Kim et Zoé arrivent finalement à tuer Mike à la fin de Boulevard
de la mort, c’est en se défaisant des stéréotypes liés à leur genre ; refusant ainsi la
construction sociétale de la femme pour choisir d’autres traits de caractères. Elles
décident d’assumer pleinement des traits dits masculins (la violence, l’instinct de
chasseur, le pouvoir sexuel) et, ce faisant, se retrouvent à armes égales avec les hommes.
Elles changent alors leur destin et sortent victorieuses de leurs duels face à l’oppression
masculine qu’elles subissent.

« Je me souviens que, à la sortie de Reservoir Dogs, nous nous sommes dit que si
nous avions remplacé nos “dogs” par des filles, le film aurait déclenché une énorme
polémique. J’aurai adoré ça. Kill Bill, c’est un peu mon Reservoir Bitches ! »

Dans l’univers de Kill Bill, l’identité féminine est totalement tributaire de la
maternité. Une femme n’est réellement une femme que lorsqu’elle devient objet : la
maternité ou la prostitution. Elle n’est définie que dans son rapport à l’homme : elle est
« l’épouse de » et « la mère de l’enfant de ». Il n’y a de violence dans le film que lorsque
ce « statut » de la femme est menacé, que lorsqu’elle sort de sa « féminité ». Elle réclame
avant tout vengeance pour avoir été privée de son enfant et de toute nouvelle possibilité
d’enfanter. Arrachée à son enfant, Beatrix ne peut plus qu’être une machine à tuer,
portant dès lors la même combinaison que Bruce Lee. Ce n’est que lorsqu’elle retrouve
son enfant, apprenant dès lors les gestes maternels du quotidien, qu’elle retrouve sa
« féminité ». Elle parvient alors enfin à parler réellement, retrouvant ainsi une épaisseur
réelle en tant que personnage.

 

« Les personnages forts sont les seuls qui m’intéressent vraiment, vous savez. Qu’ils
soient féminins ou masculins. »

Quentin Tarantino

Almog

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