SYNOPSIS :

Coline, jeune journaliste pour un magazine féminin, est envoyée dans les Pyrénées pour recueillir les propos de Simon, artiste peintre, sauvage et mystérieux, qui aurait vu apparaître le fantôme de sa mère à l’instant du décès de celle-ci. Si Coline s’apparente tout d’abord sceptique, le récit soudain de sa meilleure amie, Azar, qui aurait vu apparaître le fantôme de son père, plonge Coline dans une profonde période de doute et de questionnement… En plus d’une relation ambigüe avec Azar pour qui elle ressent une profonde admiration, Coline va tomber éperdument amoureuse de Simon, comme ensorcelée par ces deux personnages.

ENTRETIEN AVEC PASCAL BONITZER, NICOLAS DUVAUCHELLE ET ILIANA LOLIC :

Pascal Bonitzer nous raconte tout d’abord la genèse des « Envoûtés » qui est en fait directement inspirée de l’œuvre d’Henry James, Les amis des amis. En découvrant la nouvelle d’Henry James, Pascal Bonitzer dit avoir été frappé par son ambiguïté. Le lecteur se retrouve obligé de croire au fantastique ou alors à la folie de la narratrice. C’est cette ambiguïté par rapport au fantastique qui a d’abord intéressé le réalisateur, un genre qui est d’ailleurs assez peu représenté dans le cinéma français. Pascal Bonitzer a choisi de conserver cette ambiguïté puisque jusqu’à la fin du film on peut s’imaginer plusieurs choses, la question de la croyance est au cœur du film et les issues sont multiples… Le spectateur a le choix dans ce qu’il souhaite voir et comprendre de l’intrigue du film : est-ce que les évènements auxquels on assiste sont réellement fantastiques ? Ou est-ce que c’est simplement la « folie » du personnage principal qui ressurgit au fur et à mesure de son histoire d’amour ? Le premier plan du film suggère d’ailleurs ceci : Coline est dans le métro, et descend à la station « La Fourche ».

Par ailleurs, le titre du film suggère cet état de questionnement du spectateur : « Les envoûtés » parle à la fois de la dimension fantastique, de l’envoûtement que procure l’amour entre deux êtres, mais également l’envoutement du spectateur (se laisse-t-il prendre au jeux du fantastique ?). Le film est porté par des protagonistes envoûtés les uns les autres, dans des histoires d’amour ou d’amitié. Coline est envoutée par son amant, Simon, et par sa meilleure amie, Azar. A travers le film nous sommes inévitablement troublés par le personnage de Coline, on se demande si elle est fabuleuse ou si c’est simplement l’histoire elle-même qui s’écarte du réel. Nous sommes cependant ramenés à la réalité par le personnage de Pilar, la sœur d’Azar qui marque un scepticisme profond. La voix de Pilar rappelle la voix cartésienne de la raison, c’est un personnage qui a les pieds sur terre et qui n’est pas dupe. Coline, à l’inverse, s’écarte progressivement de la raison jusqu’à basculer dans l’irrationnel, lorsqu’elle se rend compte qu’elle est amoureuse celle-ci allume un cierge comme un besoin d’être rassuré par quelque chose d’irrationnel. Elle chavire peu à peu dans la folie amoureuse et en devient obsédée en s’imaginant une jalousie qui n’a pas lieu d’être, Coline recherche en fait une sorte de possession dans l’amour, elle veut que Simon lui appartienne entièrement…

Le titre résonne une nouvelle fois dans le paysage et l’esthétique du film si particulière, la brume épaisse et constante des Pyrénées enveloppe les personnages dans une atmosphère fantomatique, « une mer de nuages » cite Pascal Bonitzer, et lorsqu’on sait que le film était censé se réalisé en Occitanie on se dit le résultat n’aurait certainement pas été le même…

L’AVIS D’EXTERIEUR NUIT :

L’avis de Camille : ce qui m’as le plus touchée dans ce film est la manière dont le fantastique est retranscrit par l’image, le paysage. Lorsque Coline quitte Paris pour rejoindre Simon dans les Pyrénées, elle entre dans un univers absolument différent du sien, elle rencontre une forme d’altérité pure. Et c’est selon moi ce paysage qui l’envoute, tout autant que Simon. Les paysages sont magnifiques, la brume est pesante, c’est en bref toute une atmosphère qui est déployée sous nos yeux et qui nous fait croire au fantastique.

L’avis de Marouchka : J’ai trouvé le film très troublant, on ne sait pas trop où le réalisateur veut nous emmener mais au final on se laisse porter. Le spectateur chavire avec les personnages dans le monde du fantastique et a envie d’y croire. L’atmosphère est à la fois inquiétante et poétique et en fait un film très beau, unique. Sara Giraudeau est parfaite dans ce rôle de personnage tourmenté et énigmatique et comme elle nous sommes ensorcelés par le personnage de Simon, merveilleusement interprété par Nicolas Duvauchelle.

Camille Clot & Marouchka Alexandroff