Depuis 1939, le personnage de Batman a connu une kyrielle d’adaptations. Cinéma, jeux vidéo, livres, séries animés, il y a autant de Batman que d’adaptations. Parfois réussies, parfois ratées, mais une chose est sûre, chacun a son Batman préféré.

 

Le 2 mars dernier, Matt Reeves a décidé de nous livrer sa propre version du Chevalier Noir, une version qui remet en avant les racines premières de Batman : les enquêtes policières. Car oui, Batman est à l’origine un détective qui combat les criminels à travers de sombres investigations. Pour preuve, les aventures de Batman paraissent encore dans les Detective Comics. Dans The Batman, Matt Reeves nous propose un film de super-héros beaucoup plus réaliste où Bruce Wayne va devoir user des poings mais aussi de sa tête pour venir à bout d’un criminel sadique qui veut se venger de l’élite de Gotham.

 

Nous nous retrouvons donc dans un thriller à couteaux tirés à mi-chemin entre The Dark Knight et Seven. En effet, tous les éléments du film noir sont présents dans celui-ci : il pleut continuellement (d’où le dégât des écluses), toutes les scènes sont filmées de nuit, comme si Gotham se situait en Islande au mois de janvier, on entend la voix-off de Batman pendant la scène d’ouverture, on assiste à des profonds désirs de vengeance, une femme fatale fait des ravages et les protagonistes font face à des traumatismes dûs à un passé trouble. Nous avons là tous les ingrédients pour notre cocktail, nous avons plus qu’à secouer et déguster.

 

Enfin… Je ne conseillerai pas The Batman à tout le monde. Comme tout film noir, les longueurs contemplatives se font ressentir, moments où la beauté du plan est mise en avant au détriment du rythme et du scénario. Mais cela est nécessaire pour poser les bases de l’univers et nous faire comprendre dans quel environnement nos personnages évoluent. Par conséquent, il en résulte un film exigeant de trois heures où les personnages font des allers-retours entre les scènes de crime, le commissariat et le bat-signal. Ce film conviendra plutôt à un public expérimenté qui n’a pas besoin d’un rythme effréné pour apprécier une expérience cinématographique.

 

Autre point sensible mais essentiel : Batman et son interprète. Malheureusement, Robert Pattinson n’est pas si convaincant dans le costume du Chevalier Noir. Une fois n’est pas coutume, celui-ci nous a, en effet, habitué à de poignantes interprétations plus sombres, dans The Lighthouse notamment. Si vous avez aimé son interprétation d’Edward dans Twilight, ruez-vous en salle, vous aurez des flashbacks de votre enfance. Nous pouvons même remarquer une ressemblance physique, Bruce Wayne est blanc comme un linge, on aimerait donner à Pattinson une sucrerie pour lui éviter un malaise. Robert à une seule expression de visage tout le long du film et il y a un vrai contraste entre un Batman fort la nuit et un Bruce Wayne en pleine crise d’ado la journée. Le problème n’est sans doute pas l’interprète, la direction d’acteur ou le personnage de base, mais on ressent une difficulté à s’accrocher à ce Batman, qui se fait manipuler par quasiment tous les personnages du film.

 

Néanmoins, The Batman nous attrape et nous plonge dans son atmosphère obscure et pragmatique. Et ce, dès la magistrale scène d’ouverture où l’ombre de Batman pèse chez tous les criminels de Gotham, horrifiés à la vue de son signal, où chaque note de tuba est un frisson sur la peau des délinquants, où chaque flash de lumière est la justice qui s’abat sur eux.

 

Pour conclure, nous pouvons faire un parallèle entre The Batman et Le Joker de Todd Phillips qui ancrent leurs protagonistes dans un Gotham foncièrement réaliste et mettent particulièrement l’accent sur les tourments et les blessures des personnages. Deux films enveloppés dans des directions artistiques très fortes leur permettant d’avoir une vraie identité et de ne pas tomber dans l’oubli contrairement à d’autres adaptations. Le ton du film est donné dès le début, lorsque résonnent les premières notes de “Something in the way” de Nirvana. Le groupe de musique, emblème du style grunge, prône une philosophie  pessimiste et mélancolique de la vie. Une philosophie partagée par Batman : un homme meurtri en perpétuelle quête de justice qui ne sera apaisée que quand tous les criminels de Gotham seront derrière les barreaux.

 

Gauthier Chemin

Categories: Critiques

One comment

The Batman

  1. J’ai trouvé cette critique vraiment intéressante et bien écrite, publiée au bon moment j’ai pu la lire à la sortie du film et je partage pleinement la vision de l’auteur. Bravo !

Comments are closed.